Entretien avec Jean-Marc Chamot de Paris. Première partie.

J'ai toujours autant de plaisir à être sur un tapis que ce soit pour pratiquer ou pour enseigner... l'aïkido c'est quelque chose d'assez


Jean-Marc Chamot lit l'Aikidojournal dans son dojo à Asnieres pre Paris.

Quand as-tu commencé à pratiquer ?

J'ai commencé l'aïkido il y a 33 ans, en 72, 73. J'ai eu beaucoup de chance parce que mon premier professeur était quelqu'un d'extrêmement ouvert et d'extrêmement charismatique. Il donnait donc vraiment envie d'apprendre, et c'est grâce à lui que j'ai continué, en passant à travers les années en dépit des difficultés qui se présentent toujours à un moment donné.


Qui était-ce ?

C'est un monsieur qui enseigne toujours. Il est à la retraite : il a passé 65 ans. Il s'appelle Yvon Penglaou. C'est un Breton, un ancien rugbyman, judoka, très costaud : un monsieur de plus d'un mètre 80. Il avait commencé dans les années 60 chez un élève d'André Nocquet, Roger Lefèvre qui, à l'époque, était un des trois meilleurs pratiquants de chez Nocquet, quand ce dernier est revenu du Japon. Roger était aussi un ami de Mariano Aristin qui venait parfois au dojo, et j'ai travaillé avec eux. J'avais 16, 17 ans, j'habitais alors dans la banlieue sud de Paris et, dès la première année – j'ai accroché tout de suite - Yvon m'emmenait dans son ancien dojo à Cachan, dans la banlieue sud de Paris, et là j'ai eu la chance de pouvoir suivre les cours pendant plusieurs années avec Michel Drapeau , Max Méchard qui venait régulièrement, Michel Bécart qui venait de temps en temps et Mariano Aristin qui venait aussi occasionnellement par amitié pour Roger Lefèvre, lequel était à l'époque le trésorier de la fédération. Michel Drapeau, Max et Michel Bécart étaient des gens qui venaient de chez Noro directement.

C'était extrêmement intéressant pour le jeune lycéen que j'étais alors…
Après avoir passé mon bac, je suis parti un an pour bourlinguer, j'ai vécu un moment en Angleterre. Je suis revenu et j'ai fait des études d'anglais. C'est comme cela que je suis devenu professeur d'anglais. J'ai enseigné en collège, en lycée, et maintenant à Paris X, à la faculté de Nanterre où j'enseigne l'anglais du sport aux sportifs qui préparent entre autres des diplômes pour être professeurs de sport.


Est-ce que tu te souviens de pourquoi tu as commencé l'aïkido ?

Pourquoi j'ai commencé l'aïkido ? La véritable histoire est assez simple. Dans ma classe, à l'époque, j'avais un camarade qui préparait son 2e dan de judo. Il était très bon et concourrait en championnat de France. On s'entendait bien, et je lui ai dit : « Moi aussi je voudrais faire du judo, ou un autre sport de combat ». Il m'a répondu : « Tu es déjà trop vieux, si tu veux avoir des résultats, viens faire de l'aïkido. Je prépare mon Brevet d'Etat, il faut faire du judo, mais aussi du karaté et de l'aïkido. Viens faire de l'aïkido, le prof est super, tu vas voir, ça va te plaire et il prend les gens qui commencent plus âgés ». Je suis allé voir de l'aïkido comme ça, c'est un hasard, je n'en avais jamais entendu parler. En fait j'avais hésité entre l'aïkido et le karaté, parce qu'il y avait un très bon club dans la ville où j'habitais et c'est par amitié pour mon copain Gilles que je suis allé faire de l'aïkido.

Mais c'est vrai que dans les années 70 c'était l'époque de Bruce Lee, on cherchait la bagarre et en aïkido, souvent on se testait… c'était une époque un peu rugueuse, quoi !

Après, quand j'ai commencé mes études à Paris, j'ai voulu suivre l'enseignement de Michel Drapeau, mais il travaillait dans le milieu du pétrole et donc il partait plusieurs mois travailler sur des plate-formes pétrolifères, à Abou Dabi, en Algérie, il n'était pas régulièrement là. Je suis allé quelques temps chez Michel Bécart, jusqu'à ce que Jacques Bonemaison arrive sur Paris. Il travaillait très, très fort et j'avais la chance qu'il donne le midi des cours au magasin du Printemps où il y avait un petit dojo et le soir à Asnières, deux fois par semaine. J'ai commencé à tourner avec lui, à faire tous les stages, ça s'est enclenché à ce moment-là. Et puis Michel Drapeau venait de temps en temps ici, à Asnières aussi. À la fin des années soixante-dix quand Daniel Toutain a quitté Me Noro et a rejoint le groupe de Tamura Senseï, j'ai beaucoup tourné avec lui.

En 1978, pendant un an, j'étais à l'armée, mais je suis resté sur Paris et tous les soirs je m'entraînais ici avec Jacques Bonemaison, ou bien chez Daniel Toutain, et le midi j'allais souvent m'entraîner dans d'autres clubs. Comme je faisais mon service militaire dans les codes secrets, j'avais des horaires un peu décalés et raccourcis par rapport à la vie habituelle des camarades du contingent et c'était super, puisque cela me permettait de m'entraîner beaucoup.

À la fin des années soixante-dix j'ai commencé à effectuer des traductions pour Sugano Senseï qui revenait d'Australie et pendant neuf ans, jusqu'à ce qu'il parte aux Etats-Unis, c'est moi qui ai fait la traduction de tous ses stages à Paris, de l'anglais vers le français. J'assurais la traduction d'autres stages qu'il faisait en Bretagne, à Lesneven ou ailleurs. C'est comme cela que j'ai pu bénéficier de son enseignement.

Au tout début des années 80 j'ai passé le 1er degré du Brevet d'Etat d'éducateur sportif. J'ai commencé à enseigner à Paris. J'avais un copain qui est parti aux Etats-Unis pour ses études et j'ai repris son club dans Paris pendant un an et puis, quand Jacques Bonemaison a quitté Paris, en 1979-80, pour aller en Touraine, j'ai repris le club ici, à Asnières. Et je n'ai jamais cessé d'enseigner.

Ces années-là [à la fédération], il y avait les « cadres annexes ». J'étais un peu plus jeune que toute la mouvance de Jean-Paul Avy, Gilbert Milliat, de Tiki Shewan et d'autres … Stéphane Benedetti était encore au Japon, mais il y avait aussi René VDB [van Droogenbroeck], Jean-Claude Joannès… j'étais de la génération qui venait juste après, de 4-5 ans plus jeune en aïkido. Donc j'ai intégré les cadres quelques années après eux. Je suis resté cadre un paquet d'années, jusqu'à la fin des années 90. Là j'ai décidé de ne plus m'engager et de faire une pause, entre autre pour des raisons professionnelles, pour faire une thèse de doctorat que j'ai soutenue en juin, donc j'allais avoir besoin de temps pour cela.

Entre temps, à la fin des années 80, j'avais passé le 2e degré du BE d'éducateur sportif qui appelle à former les professeurs, ce qui est vraiment ma passion : aussi bien professionnellement que pour l'aïkido, j'ai une vocation de formateur. Cela m'intéresse, c'est vraiment quelque chose qui, je pense, correspond à ma façon de réfléchir, à mes capacités peut-être aussi, au-delà de la technique qui m'a toujours passionné.

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