Du vide au néant


Léo Tamaki pendant notre entrevue à Prais 2014

Lorsqu’une personne débute les arts martiaux, elle a rarement un contrôle optimal de son corps et de son esprit. Toutefois, par un apprentissage méthodique, la pratique peut l’amener à une maîtrise très fine d’elle-même, et la doter de capacités extraordinaires.

Seïchusen 正中線
Le seïchusen, littéralement la ligne médiane correcte, est un terme utilisé par différents maîtres du Budo. Comme toujours, leur interprétation peut varier de façon notable. À titre personnel, j’utilise le mot seïchusen pour désigner l’axe fondamental autour duquel s’organisent les actions physiques. Pour un néophyte, cet axe se confond à peu près avec la colonne vertébrale. Il ne s’agit toutefois que d’un centre matériel, et si les membres lui sont bien reliés, il n’y a pas entre eux de véritable lien permettant des actions subtiles et efficaces. À ce stade, le corps dans sa globalité est une cible vulnérable.

Le tronc
Les premières étapes de formation de l’élève devront donc l’amener à développer un centre conscient. C’est autour de cet axe, large et épais qui se confond au départ avec le buste, que se développeront ses gestes. Le corps reste toujours vulnérable car s’il devient plus aisé de mouvoir ses membres, ce n’est pas le cas du tronc qui reste une cible facile, car très statique.

Le fil
Peu à peu le pratiquant apprendra à affiner son seïchusen, jusqu’à ce qu’il devienne aussi ténu qu’un fil. Tendu comme une corde de piano, les mouvements qui s’organisent autour de lui deviennent plus sophistiqués, variés et efficaces. La seule partie “fixe” étant fine, et le reste du corps étant devenu libre, il devient beaucoup plus difficile de toucher le pratiquant.

Au stade suivant, l’adepte apprend à déplacer cet axe dans son corps. Il peut aussi bien rester sur place et déplacer la ligne, que la laisser où elle est et se mouvoir. Les perceptions de ses adversaires sont troublées, et il devient très compliqué de l’atteindre.
À noter que des adeptes qui sont à un stade supérieur font parfois volontairement percevoir un axe pour perturber ceux qui leur font face.
Le point
Lors de l’étape suivante la ligne se réduit à l’extrême et devient un point. Le corps a acquis une liberté et une mobilité extraordinaires, et ne laisse qu’une cible minuscule.

Le vide
À la dernière étape, enfin, le néant. Les gestes sont générés sans s’appuyer sur un axe ou un point, ce qui les rend impossible à lire. Il n’y a plus de cible, l’adepte est insaisissable.

Les pièges
Les voies que nous empruntons recèlent de nombreux pièges. Chaque étape étant source de progrès, il est aisé de s’illusionner et de s’abandonner à une sensation d’achèvement. Tout progrès devient alors impossible.
Les adeptes qui restent à un stade particulier sont nombreux et se reconnaissent facilement. Ils font généralement, mieux, la même chose que dix ou vingt ans plus tôt. L’évolution est difficile car elle signifie souvent une perte de repères et une régression dans l’efficacité.


Aparté sur le centrage
Une des phrases les plus répandues dans les dojos d’Aïkido est “Tu n’es pas centré.”. E


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