Chaque samedi Yves Tirelli donne un cours de Masakatsu Bo-jutsu

Yves Tirelli a bien voulu s'entretenir avec nous.

De passage à Biarritz la rédaction d'AikidoJournal a trouvé un dojo où pratiquer pendant son séjour. Le club dirigé par Yves Tirelli est situé dans une petite rue en pente du centre ville. On y pratique, dans une excellente ambiance, l'aikido tel que l'enseigne Gérard Blaize. Yves Tirelli a bien voulu s'entretenir avec nous.
Yves Tirelli a bien voulu

Pourrais-tu nous dire ce qui t’a amené à l’aïkido ?

J’ai commencé l’Aïkido en 1996 : J’y suis venu suite à une longue maladie. Auparavant, j’avais fait du judo, du karaté Shotokan pendant plus de 12 ans, de la boxe thaï, du close-combat à l’armée : j’étais plutôt dans des démarches orientées vers le combat. Mon meilleur ami faisait de l’aïkido et m’a finalement amené à découvrir cette discipline. Ce qui m’a tout d’abord interpellé, c’est que je ressortais des cours sans fatigue, mais au contraire en pleine forme, ressourcé.

De surcroît, je me suis aperçu que je n’arrivais pas à toucher le professeur. J’étais comme aspiré, déséquilibré, et cela m’a tout de suite interrogé. Au-delà du ressenti physique, l’approche énergétique de l’aïkido m’a donc touché. Etant quelqu’un de décidé, de passionné – quand je m’engage dans quelque chose je vais jusqu’au bout, j’essaie, sinon de maîtriser (on ne maîtrise jamais vraiment tout) du moins d’atteindre un certain niveau qui soit raisonnable – je suis tout de suite allé voir le professeur de mon professeur, c’est-à-dire Gérard Blaize, 7e dan, afin de m’investir encore davantage dans le travail. Je suivais des cours presque tous les jours et je faisais des stages le plus souvent possible. Je suis aussi allé au Japon, à Shingu, voir le professeur de Gérard Blaize [Me Hikitsuchi Mikio].

Et puis j’ai décidé de changer de métier et de région et de ne plus me consacrer qu’à l’Aïkido et au Yoga. Je suis donc venu ici, au Pays basque, et j’ai ouvert un club, à Biarritz et à Ciboure : au bout de deux ans d’installation, le club a déjà une trentaine d’élèves.


Tu as donc commencé avec Gérard Blaize ?

Non, mon premier professeur, à Senlis, était un de ses élèves, Jean-François Depoisson, auprès duquel j’ai obtenu mon 1er dan. Les premières années je pratiquais sur Senlis et deux fois par semaine sur Paris. Ensuite j’ai déménagé sur Paris pour ne pratiquer qu’auprès de Gérard Blaize.

Et qu’est-ce qui t’a amené à t’installer ici ?

Certainement pour être davantage en accord avec mes valeurs ! Je voulais aussi me consacrer entièrement à l’étude de l’Aïkido et du Yoga. De surcroît j’envisageais déjà depuis longtemps de m’établir en province, dans un lieu plus proche de la nature. Mon choix s’est donc porté très vite sur cette magnifique région du Sud Ouest de la France. Et de plus aucun club appartenant au courant de Gérard Blaize, affilié à la FFST, n’était implanté dans la région.

Qu’y a-t-il comme aïkido dans la région ?

Toutes les fédérations y sont désormais représentées : FFAB et FFAAA, puis maintenant FFST (fédération multi-sports).


Y a-t-il des rencontres entre les différents groupes ?

L’Aïkido est une démarche, ce n’est pas un sport, à ce titre la transmission se fait à travers la relation d’un professeur à un élève, comme la plupart des disciplines orientales. Dans le Yoga par exemple, on choisit un professeur, une lignée, qui correspond à une forme de travail, une tradition. Lorsque l’on a réalisé ce choix, il est très difficile de suivre un autre professeur, car cela renverrait à une autre approche, à une autre forme de travail. Et l’Aïkido n’échappe pas à cette règle, car il s’est développé plusieurs orientations dans l’enseignement de cette discipline, et ces orientations sont représentées par les différentes fédérations !

Dans mon cas, le choix que j’ai fait en suivant l’une de ces orientations, à travers l’enseignement de Gérard Blaize, me convient et j’y trouve un sens qui nourrit ma pratique.


Comment amènes-tu un débutant à s’engager dans cette voie ? Lui enseignes-tu d’abord l’ABC, les ukemi, les techniques de base ? Ou bien, le plonges-tu tout de suite dans le « grand bassin » ?

Pour en revenir à ce que je disais, j’ai adopté la pédagogie traditionnelle transmise à travers l’enseignement de Gérard Blaize, qu’il a lui-même reçu de son professeur, Hikitsuchi Sensei, 10e dan. Ainsi chaque débutant est tout de suite plongé dans le cours, et c’est grâce à la pratique avec les plus gradés, et par la répétition de l’entraînement, que l’apprentissage se fait, y compris celle de chuter, et cela se passe tout naturellement.
L’enseignement que nous avons reçu, à travers la transmission de Hikitsuchi Sensei, qui lui-même les avait reçues de O Sensei, comporte 3 principes de base : « Commencer le premier, ne pas attendre, et ne pas regarder ». Donc on met des cadres d’étude pour aller dans cette direction, et pour pouvoir « guider » le partenaire. C’est le travail, la recherche.


Une des choses les plus dépaysantes, pour un pratiquant qui arrive de l’extérieur, c’est que nage commence le premier. Même si à partir d’un certain niveau, en randori par exemple, c’est aussi le cas dans les autres écoles, on y pratique quand même beaucoup en go-no-keiko, sur une saisie ferme, ou une attaque initiée par uke.

C’est O Sensei lui-même qui disait qu’il fallait commencer le premier. Parce que quand on commence le premier, on « aspire » l’autre. Et parce qu’on « aspire » l’autre, on peut le guider. Et la technique n’est qu’un outil qui permet de guider le partenaire.

Si on ne commence pas le premier, on va être dans le combat. C’est-à-dire que la personne en face peut nous toucher. Ou alors, c’est qu’il y a quelque chose d’un peu faux dans l’attaque, car si le partenaire connaît le combat, et la manière d’attaquer, on ne fait pas le poids, c’est évident. Donc, il faut commencer le premier ! Ce qui est d’ailleurs très difficile, car il faut l’unité du corps, et de l’esprit !

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