… entretien accordé à l’occasion du 20e anniversaire du stage d’aikido de Bermau am Chiemsee (Bavière)
Je voudrais tout d’abord vous remercier de nous avoir accordé cet entretien. Pouvez-vous nous parler de votre vie au Japon, quand vous étiez jeune, avant de commencer l’aïkidō ?
Je ne m’en souviens pas (rires). Est-ce que je peux dire que j’étais un bon garçon? J’allais à l’école, tout le monde m’aimait bien…
Quel âge aviez-vous quand vous avez commencé l’aïkidō? Avez-vous déjà pratiqué d’autres arts martiaux ?
Non, je n’ai pratiqué que l’aïkidō. J’ai commencé avec l’aïkidō après avoir terminé mes études secondaires. Je suis entré à l’université et en même temps je suis devenu uchi deshi. J’ai déserté les études et je me suis consacré à l’aïkidō. Mon premier jour d’aïkidō a été mon premier jour comme uchi deshi. J’avais déjà entendu parler de l’aïkidō, mais je n’avais pas pratiqué avant de devenir uchi deshi. C’est assez inhabituel. J’ai été acceptée comme élève sans avoir d’expérience, parce que j’avais de bonnes relations avec la famille Ueshiba. J’ai donc eu la chance d’être accepté comme uchi deshi. Si vous voulez en savoir plus, en fait, quand j’étais jeune, j’étais vraiment un mauvais garnement, et c’est pour ça que j’ai commencé l’aïkidō (rires). Je me suis dit que devais faire quelque chose de ma vie. Je devais changer mon style de vie. Je voulais profiter de ma vie après le lycée. J’avais 18 ou 17 ans.
Vous êtes allé directement au Hombu-dojo?
Oui. Mon premier jour d’aïkidō, c’était aussi le premier jour de ma vie d’uchi deshi.
Ōsenseï était-il présent tout le temps ?
Non, il s’était déjà retiré à Iwama et ne venait que de temps en temps. A l’époque, M. Arikawa, M. Tamura et M. Noro vivaient déjà comme uchi deshi au dojo.
Qui enseignait à l’époque ?
C’était bien sûr Kisshomaru Ueshiba, le Doshu. Et bien sûr Koichi Tohei, qui, en quelque sorte, était l’instructeur-en-chef.
Et Arikawa ?
Non, Arikawa n’enseignait pas, Arikawa était plus jeune que Tohei. Il travaillait dans une entreprise. Je ne sais pas pourquoi il dormait au dojo. Le matin, il allait au bureau. C’était un employé. Tada Sensei enseignait déjà l’après-midi, mais le cours du matin, à 6h30 du matin, était toujours le cours de Kisshomaru Ueshiba. C’était, bien sûr, dans l’ancien dojo, à côté de la maison de la famille Ueshiba. On dormait tous sur le tatami du dojo. C’était une vie difficile, mais en y repensant, cela a été une expérience très enrichissante, inestimable. Je pleins les jeunes d’aujourd’hui qui n›ont plus de telles possibilités. Les temps changent...
Combien de temps êtes-vous resté au Hombu dojo ?
Jusqu’à mon mariage, j’avais alors 22 ou 23 ans. Pendant quatre ou cinq ans, j’ai été uchi deshi. Puis j’ai eu mon propre appartement, mais je faisais toujours la navette jusqu’ à l’Aïkikaï .
Quand avez-vous quitté le Japon ?
En 1964. J’avais 26 ans. Je pense que je suis le premier qui soit parti. Non, Noro était parti avant moi, en France. Tamura est parti après moi.
Êtes-vous retourné au Japon entre-temps ?
Je ne suis pas rentré pendant 8 ans, à cause d’un problème de visa. C’était très difficile. Quand j’ai quitté le Japon, j’avais déjà une famille, une fille, mais je n’ai pas pu les emmener à New York car il n’y avait aucune garantie que ça marcherait, que je pourrais gagner ma vie, tout était nouveau. J’ai dû quitter ma famille et j›ai obtenu un visa spécial qui n’était valable que pour deux ans. Après mon installation, j’ai fait venir ma famille. Après deux ans, le visa a expiré et ils m’ont dit : « Rentrez chez vous ». J’avais un visa très spécial. Si j’étais parti, je n’aurais pas été autorisé à revenir avant deux ans. Donc je suis resté à New York illégalement. J’ai dû renvoyer ma famille. Il m’ a fallu huit ans pour obtenir un permis de séjours permanent. Ce que je regrette, c’est que lorsque Ōsensei est décédé, je n’ai pas pu me rendre aux obsèques, parce que si j’étais parti pour le Japon, je n’aurais pas pu retourner aux États-Unis avant deux ans. Il aurait fallu tout reprendre à zéro. Ce fut un moment très émouvant et difficile. Je suis resté à New York, car c’était ma mission. C’était des émotions très fortes et ce fut le moment le plus difficile de ma vie.
Aujourd’hui, vous n’avez plus de problèmes de visa, n’est-ce pas ?
Après 8 ans, quand Nixon est devenu président, finalement, cela c’est arrangé pour moi. Il a annulé le programme de « visa d’échange culturel ». Le visa avait des règles très strictes, car deux pays étaient impliqués, il y avait réciprocité. Quand Nixon est devenu président, c›est devenu plus facile, car il a annulé le programme.
Qu’est-il arrivé à votre famille alors ?
C’est encore autre chose. Ma première fille était japonaise, mais mes deux filles suivantes étaient américaines. J’ai eu beaucoup de soucis. De moi, de ma femme et de ma fille japonaise, il n’en avaient rien à faire. Mais maintenant, j’avais deux filles américaines et cela leur posait un problème. J’ai donc consulté mon avocat. Je leur ai dit : « Je ne peux pas élever ces deux enfants, deux Américaines, au Japon ». Ils m›ont interrogé sur mes revenus : combien je pourrais gagner si je retournais au Japon. Alors, j’ai écrit au Honbu-dojo et leur ai demandé une attestation de ce qu’ils pouvaient me payer, si je revenais au Japon avec une aussi petite somme que possible. Avec ce montant, je ne pouvais pas élever mes deux enfants, citoyens américains. Cela posait problème aux autorités. Cela m’a fait gagner un peu de temps. Mais une fois de plus, ils ont refusé. Mon avocat a dû penser à autre chose. En juin et juillet, c’est la saison des pluies au Japon, ils pleut énormément, il fait vraiment très humide. On a fait valoir que la météo japonaise n’était pas bonne pour la santé des enfants américains. J’ai rempli tous les papiers. J’ai eu un nouveau sursis … Encore une fois ils ont refusé. Enfin, j’ai pu rester. Ça a été très dur.
Il y a cinquante ans, il n’était pas possible de gagner sa vie en enseignant l’aïkidō ou d’organiser un stage comme celui-ci. C’était très difficile. Il n’ y avait pas de marché, pas beaucoup de pratiquants d’aïkidō. Financièrement, cela a été très dur.
Le dojo de New York était-il votre premier dojo ?
Oui, j’ai été à New York tout le temps. Bien sûr, je suis allé dans d’autres villes pour répandre l’aïkidō, mais mon quartier général, mon dojo central est à New York.
Que pensez-vous de l’avenir de l’aïkidō?
Bonne question ! Je ne sais pas trop … J’aimerais le savoir, mais cela ne dépend pas de moi. Dois-je être positif ou négatif ?
Positif !
Que voulez-vous dire ? Du point de vue de la qualité? Je pense que cela se développera, qu’il y aura plus de gens qui s’impliqueront. Cependant, même aujourd’hui, sur le plan de la qualité, je n’ai aucune certitude. C’est quelque chose d’inévitable pour l’aïkidō, à cause de la nature de laïkidō – je ne sais pas comment le dire. Cela a de bons et de mauvais côtés, mais en aïkidō, on peut devenir professeur facilement. Tout le monde peut enseigner, même des shodan … Certains suivront cette personne et ils resteront au niveau, à la qualité, de cet enseignant. Heureusement, certains élèves comprennent qu’il y a autre chose en aïkidō, et ils quittent ce professeur [pour aller voir ailleurs]. C’est une situation très difficile, et je ne veux pas insulter qui que ce soit, mais ce n’est un secret pour personne qu’il y a une différence entre qualité et quantité. Et la qualité n’y est pas … Même maintenant, ici, je peux voir sur le tatami qu’il y des niveaux différents, cela dépend de qui est le professeur.
Malheureusement, je suis le dernier de ma génération. C’est un sujet délicat pour moi, mais malheureusement, peu de gens ont la chance d’avoir eu la même expérience que moi. Pour ma part, c’est difficile à dire. Je ne veux pas dire du mal des gens. Nous pourrions nous développer, mais en profondeur et en qualité ? Même dans mon propre dojo. Je n’ai aucune assurance de ce que sera la situation dans dix ans. Dans 10 ou 20 ans, il y aura peut-être encore quelqu’un dans mon école qui aura été mon élève. Mais la génération suivante ? Avec de la chance, les gens se souviendront de mon nom. Qui sait … C’est déjà en train de se produire. En France, peu de gens connaissent Tamura Sensei, sa qualité, son talent.
Le souvenir disparaitra. Malheureusement. Je ne devrais pas être si négatif, mais c’est la réalité. En fait, je ne sais pas trop. J’espère que l’avenir sera bon. On me pose souvent cette question. Je pourrais dire : « Pas de problème, tout ira bien », mais je dois être honnête. Cette question, je me la pose moi-même. Je ne peux rien y faire. Je m’inquiète … non, je ne m’inquiète pas, mais je me demande ce qui va se passer.
En France, depuis 2010, les grandes fédérations ont perdu plusieurs milliers de membres…
C’est peut-être parce qu’il y a plus de petits groupes indépendants. C’est un autre de mes soucis. Avant, en France, il y avait deux organisations qui étaient reconnues par l’Aïkikaï. Aujourd’hui, l’Aïkikaï reconnait un grand nombre de petits groupes. Sur le plan organisationnel, je ne sais pas ce qui va se passer à l’avenir. C’est l’affaire de l’Aïkikaï . C’est une situation difficile. Idéalement, il y aurait une organisation reconnue par l’Aïkikaï par pays. Mais c’est impossible. Je reviens de Russie. Il y a beaucoup d’organisations nationales. Ils sont venus me voir pour se plaindre. Il y a 18 groupes reconnus par l’Aïkikaï. C’est absurde sur le plan organisationnel. Ça arrive. Certains d’entre elles ne font même pas d’aïkidō. Ils organisent un stage international, font venir un petit jeune du Japon, un stage avec 80 participants. J’ai donné un stage à Saint-Pétersbourg, et une semaine après il y avait un autre stage, dans la même ville, avec un petit jeune enseignant du Japon.
Et le jeune était aussi envoyé par l’Aïkikaï ?
Oui, par l’Aïkikaï. Incroyable ! Le mois suivant, je suis allé au Brésil, à Sao Paulo. C’était la même histoire là, il y avait un autre séminaire le même week-end, dans la même ville !
C’est intentionnel ?
Je ne sais pas, c’est un autre groupe, c’était peut-être intentionnel …
Avant, c’était plus simple, parce que Tamura était là. Avec moi aux États-Unis et avec Asai [en Allemagne], tout est bien en main. Mais quand nous ne serons plus là, je suis très pessimiste pour l’aïkidō. L’aïkidō est censé être harmonie. Mais ceci, c’est le contraire de l’aïkidō. C’est une bonne chose qu’il n’y ait pas de compétition en aïkidō. Mais autre raison de cette situation est l’absence de compétition. Peut-être pouvons-nous éviter ces problèmes à l’avenir, mais avec la nouvelle génération, c’est très difficile de préserver la morale traditionnelle. Il n’ y a plus de personne qui inspire le respect. Ils n’ont plus de maître à suivre. Certains sont encore fidèles à Tamura, mais avec le temps, cette loyauté passera. Je suis désolé d’être aussi négatif, mais c’est un autre fait que vous ne pouvez pas ignorer ou nier. Cela se produit déjà dans tous les pays. Alors les gens disent : « Qui est à l’origine de ces problèmes et de ces conflits? C’est l’Aïkikaï ».
Je suis dans une position difficile : je suis un représentant de l’Aïkikaï , mais je dois aussi défendre mes élèves. Je suis dans un dilemme. Je dois protéger l’Aïkikaï, mais aussi mes élèves. Pour ça, je dois me battre. Mais encore une fois, je suis probablement le dernier à pouvoir parler haut et fort à l’Aïkikaï. C’est pourquoi il y a beaucoup de problèmes. Beaucoup de plaintes … C’est la faute à Internet… Ils viennent du monde entier pour se plaindre. Il n’ y a personne d’autre à qui s’adresser, donc je suis très occupé. Par exemple : j’étais à Saint-Pétersbourg. Le dirigeant d’une grande organisation est venu de Moscou pour se plaindre de l’Aïkikaï. Ils viennent tous me voir pour me demander mon avis. Que va-t-il se passer quand je ne serai plus là ? Il n’y aura plus personne, malheureusement !
Comme vous le savez, Chiba, qui était comme un frère pour moi, du temps où nous étions uchi deshi, est décédé, il y déjà deux ans. Je n’ai plus aucun de mes compagnons uchi deshi : Arikawa, Tamura, Noro, Kanai, Sugano… ils nous ont tous quitté. Il ne reste plus que moi. J’ai écrit une histoire pour un magazine d’aïkidō japonais. Dans cette histoire je dormais et Ōsensei m’est apparu en rêve. J’ai demandé à Ōsensei : « Qu’avez-vous fait de tous mes amis uchi-deshi ? » Il m’a répondu : « Tu sais, maintenant je répands l’aïkidō dans tout l’univers, j’ai beaucoup de travail et j’ai besoin d’aide. Alors, je les ai appelés. » Je lui ai dit : « Mais alors, pourquoi n’as-tu laissé que moi sur terre ? » Et lui : « Parce que tu n’as pas achevé ta mission. Tu dois rester. » C’est une drôle d’histoire...
Je me souviens, il y a 4 ans, Doshu a dit que son grand-père se demandait combien de personnes faisaient un aïkidō différent et dans combien de groupes différents, qu’il ne comprenait pas...
Il était surpris de ce que les gens faisaient. C’est dans la nature de l’aïkidō, l’aïkidō est si flexible, techniquement. Ce n’est pas comme le judo. En judo, tout le monde vient de la même souche. [En aïkidō, il y a des différences, selon votre physique ] : lourd, maigre, grand. Dans le judo c’est tellement évident, un ippon seoi nage c’est un ippon seoi nage, que ce soit ici ou là-bas. C’est pourquoi il est si difficile de trouver un nom pour chaque technique d’aïkidō. Tout pourrait être une technique. Quand Ōsensei voyait ce que nous faisions, il disait : « Je n’ai pas enseigné ça. »
Ce qu’il faisait était différent?
Mais bien sûr! Je crois que les seules techniques que j’ai vues Ōsensei faire étaient irimi nage, ikkyo, quelques fois shiho nage. C’est tout ce dont je me souviens. Toutes les autres techniques, ce sont les autres qui les faisaient : Doshu [Kisshomaru Ueshiba], Tohei Sensei, Arikawa Sensei, Osawa Sensei, Yamaguchi Sensei. Certaines des techniques que je fais, je les ai créés accidentellement. L’aïkidō apparait dans l’instant. Cela dépend du timing et de la forme de l’attaque. Des fois pour plaisanter je dis que c’est le manuel d’aïkidō : ikkyo, nikyo, sankyo, yonkyo … au fond, c’est tout… shiho nage, kote gaeshi… Qui a créé le système ? Ōsensei n’aimait pas systématiser. Pour Ōsensei, la technique, sa façon de bouger. Il est impossible de mettre un nom sur chaque mouvement : c’est illimité. Mais d’une certaine façon, il fallait donner un nom aux techniques, pour les examens. Pour Ōsensei, les examens, cela n’existait pas. Pour lui, il n’était pas nécessaire de donner un nom à chaque mouvement. La nomenclature, je pense que cela date du temps du deuxième doshu, Kisshomaru.
Dans l’une de nos dernières éditions, nous rapportons une intervention de Peter Goldsbury sur un forum. Il affirme que le doshu actuel [Moriteru Ueshiba] n’est pas bien informé de l’aïkidō d’Ōsensei.
Je parle à Goldsbury de temps en temps, c’est mon bon ami. En fait, c’est moi qui lui ai fait passer son shodan, [Peter Goldsbury est aujourd’hui 7e dan. Il a été le président de la Fédération internationale d’aïkidō (IAF) de 1996 à 2016]. Nous sommes tout à fait du même avis sur l’IAF. Il a été très mal traité par l’IAF. Cela me met tellement en colère et c’est pour ça que je reste à l’écart. Je participe aux stages, mais je ne vais pas aux réunions de l’IAF. C’est pourquoi l’Aïkikaï a nommé un nouveau responsable. Je ne devrais pas dire ça, mais je n’ai aucun espoir. Je suis fidèle à la famille Ueshiba. Mais, pour moi, quand le second doshu, Kisshomaru, est décédé, c’était fini. Je continue parce que c’est ma vie, pour mes élèves.
Beaucoup de gens sont du même avis, mais ils sont polis, et donc ils ne disent rien, mais je n’entends que des critiques sur l’Aïkikaï, les gens disent que c’est un système familial, comme en Corée du Nord. J’aime bien le jeune fils [Mitsuteru Ueshiba]. Mais encore une fois, qui y a-t-il encore pour lui apprendre l’histoire ? Personne. C’est une des raisons qui fait que, quand je répond à votre question sur l’avenir, je dois être pessimiste. Je suis désolée. Je parle très franchement. Cela m’inquiète vraiment, mais je ne peux rien y faire. L’été dernier, j’ai invité le jeune Ueshiba à mon stage d’été. J’ai passé une semaine avec lui. J’ai essayé de lui raconter l’histoire de son grand-père, d’une certaine façon, j’ai essayé de l’éduquer, …
C’est drôle … Il m’a rappelé une histoire que j’avais complètement oubliée : un jour il est venu me voir et m’a dit : « Monsieur Yamada, vous ne vous en souvenez pas, mais vous m’avez sauvé la vie. » Je lui ai demandé ce qu’il voulait dire. Je lui avais vraiment sauvé la vie, mais je ne m’en souvenais plus. Un jour, il devait avoir quatre ou cinq ans, il y avait une voiture garée devant le dojo, avec le coffre ouvert, et lui il jouait dans le coffre ! Le chauffeur ne s’en était pas rendu compte et allait refermer le coffre sur le gamin … J’ai vu ça et j’ai crié : « Arrêtez ! » Et il s’est souvenu de cette histoire et m’a dit : « Vous êtes mon sauveur, vous m’avez sauvé la vie ! » Ainsi, il est très proche de moi… J’ai essayé de lui parler de son grand-père, Kisshomaru doshu …
Encore une fois, c’est la nature de l’aïkidō : si tu peux bouger, Uke te suit … Mais il n’a pas passé assez de temps à pratiquer sur le tatami. Quand le doshu actuel était jeune, Tamura et moi avons offert à l’Aïkikaï de prendre soin de lui. « Pourquoi vous ne nous le confiriez pas? Nous prendrons soin de lui, il gagnera de l’expérience, pas seulement comme enseignant, mais aussi sur les rapports humains au niveau international. » Et ils ont dit non. Cela lui aurait permis de voir le monde, d’en avoir une expérience vécue, pas seulement par ouï-dire. Ils auraient dû l’envoyer à l’étranger. C’est ce qu’ils auraient dû faire : l’envoyer en France, l’envoyer en Amérique. Cela fait partie de la formation d’un futur dirigeant. On se serait occupé de lui. C’est une expérience précieuse, inestimable.
Par exemple, [Hayato] Osawa est venu à La Colle …
J’invite encore Osawa, bien qu’il n’en ait plus besoin maintenant. Parmi les jeunes, je recommande le jeune Osawa. C’est pourquoi il est très occupé, il sait communiquer avec les gens, comment les traiter convenablement. Ses techniques sont très pures. C’est le problème : beaucoup de jeunes n’ont pas une technique pure. Ils ont leurs propres idées. Ils essaient de frimer. Peu de gens font des techniques de base, des « techniques selon le manuel » … des techniques courantes, pas votre propre style. Je n’aime pas qu’on parle d’un « style personnel ». Les techniques doivent être fortes, fondamentales, aujourd’hui elles sont trop digérées et traduites, malheureusement. Mais encore une fois, c’est dans la nature de l’aïkidō : se mouvoir librement… Il y en a qui disent que c’est-ce qui est bien dans l’aïkidō, le côté individuel. Je ne sais pas trop. C’est peut-être un bon côté de l’aïkidō, mais c’est peut-être aussi son mauvais côté. C’est très difficiles. Sur le plan organisationnel, je suis très pessimiste. Les gens commencent à perdre leur respect pour l’Aïkikaï . Et c’est leur faute : ils font tant de bêtises. Les gens disent : « Laisse-tomber ! » Vous, les journalistes, vous devez avoir constaté ça, vous devez entendre beaucoup de gens dire ça.
Est-ce la raison pour laquelle le fils de Noro, Takeharu, se rend régulièrement chez Maître Asai maintenant?
C’est vrai? Asai et Noro étaient de très bons amis. Le fils de Noro pratique l’aïkidō ? Il avait aussi un fils ? Je croyais qu’il n’avait qu’une fille … lisez plus dans l'édition 64FR