Libérer les pratiquants


Léo Tamaki pendant notre entrevue …

“Il est certain que la relation directe du maître au disciple qui est la relation traditionnelle, identique dans son essence à la relation des parents à leurs enfants est la meilleure possible. Dans le monde moderne, une telle relation est malheureusement devenue pratiquement impossible.”
Tamura Nobuyoshi


Se libérer


Je considère le Budo comme une Voie de libération de l’Homme. C’est en ayant à coeur de me libérer de mes peurs et mes illusions que je pratique, et c’est en ayant à l’esprit d’aider les personnes qui me suivent à atteindre le même objectif, que j’enseigne.
Lorsqu’il évoque la relation du maître au disciple, Tamura senseï indique qu’elle est identique dans son essence à la relation des parents à leurs enfants. Malheureusement aujourd’hui, loin d’agir comme des parents à l’amour inconditionnel ayant la volonté de rendre leur progéniture autonome, de nombreux enseignants agissent trop souvent comme des amoureux possessifs désireux d’emprisonner l’objet de leurs désirs.



Il est évident que le premier problème vient de nous-mêmes. Force est de constater que beaucoup trouvent dans l’enseignement des arts martiaux un moyen de se construire une identité flatteuse. L’élève est alors une preuve de sa propre valeur, et son départ constitue une menace à l’image que l’on s’est construite. S’il est parfaitement naturel que l’on prenne son rôle à coeur, il est en revanche essentiel que l’élève ne soit pas utilisé comme un miroir déformant dont on se sert pour améliorer son estime de soi.


Les élèves ne sont pas des enfants
Il faut aussi en outre ne jamais perdre de vue que la relation parents/enfants est purement symbolique. Si un professeur doit être respecté pour le savoir qu’il possède dans la pratique martiale, il convient qu’il n’oublie jamais que cela ne lui donne en aucun cas une valeur supérieure à quiconque. Il est d’ailleurs plus que probable que chacun de ses élèves puisse être son enseignant dans un domaine ou un autre. Infantiliser les pratiquants, les menacer, leur faire du chantage affectif, sont tout autant de comportements intolérables à bannir.


Shu ha ri
“(Shu ha ri) s’applique à toutes les techniques traditionnelles, que ce soit dans le Chado, la voie du thé, le Kado, l’arrangement floral, etc. Toutes ces voies s’étudient ainsi et passent par ces étapes. Shu est l’étape où l’on suit scrupuleusement l’enseignement de son maître jusqu’à arriver à reproduire exactement les techniques. Une fois arrivé à ce niveau on essaye de voir ce que tel ou tel changement implique. On sort du moule pour continuer son étude. C’est ha. Finalement on dépasse les contradictions et la technique devient sienne. C’est ri.”
Tamura Nobuyoshi



Shu ha ri représente aussi symboliquement le passage de l’enfance à l’âge adulte.
L’étape shu correspond à l’enfance. On copie. On essaye de faire comme papa maman. L’étape ha correspond à l’adolescence. On veut faire différemment. On veut vivre ses propres expériences. Ri, enfin, est l’âge adulte. On n’essaye plus de copier ou faire le contraire de ses parents. Nos actes ne sont plus supposés être en réaction.



Bien entendu être sorti de l’adolescence ne signifie pas que l’on sache tout. Et chaque instant de notre vie peut, jusqu’au dernier, être source d’évolution. Notez en outre que shu ha ri est un processus riche qui comporte de nombreux enseignements, et d’autres niveaux de lecture.
“Shu est l’étape où l’on suit scrupuleusement l’enseignement de son maître jusqu’à arriver à reproduire exactement les techniques. Une fois arrivé à ce niveau on essaye de voir ce que tel ou tel changement implique. On sort du moule pour continuer son étude. C’est ha.”


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